vendredi 7 mai 2010

Le merveilleux mensonge des médicaments génériques

David elia

Tous les médicaments génériques ne seraient pas la copie exacte des médicaments de marque, en effet certaines différences subsistent...

Ne vous êtes-vous jamais demandé(e) pourquoi les pharmaciens génériquent nos prescriptions avec autant de frénésie depuis que ce droit leur a été donné en 1999 ?

Connaissant le genre humain, traditionnellement rebelle à l’effort gratuit cela est resté longtemps pour moi un vrai mystère.

En fait, grâce au Canard Enchainé (1), je sais maintenant que c’est probablement -en partie- en raison des « marges arrières », des ristournes des labos génériqueurs (qui pouvaient atteindre encore récemment jusque 25%). Et qu’ils n’ont pas hésité alors à se charger avec enthousiasme de la besogne ingrate qui consiste à rectifier nos prescriptions, qui plus est avec la bonne conscience de faire faire des économies à notre système de santé. Le « hic » est qu’ils auraient dû répercuter une partie de ces marges en baissant le prix de vente des dits génériques (loi Dutreil de 2005) et… que certains ne l’ont pas fait.

Bon ! Entre nous ce n’est pas mon affaire de mettre mon nez dans le business de nos amis pharmaciens. En fait je suis bien plus préoccupé par l’imposture des génériques auprès de nos patient(e)s.

Oui, imposture car :

 « ..un médicament générique est la copie exacte (2) d’un médicament de marque….il contient le même principe actif et a le même effet thérapeutique.. » dit l’Assurance Maladie. En fait l’effet thérapeutique « à l’identique » n’est pas assuré à 100%, on va le voir.

 « ..il est soumis aux mêmes normes de qualité et de sécurité » pas vraiment encore car tous les génériques ne sont pas la copie exacte des princeps.

Oui tout cela n’est pas très exact car si les génériques ont en principe les mêmes actifs que le princeps ils n’ont pas l’obligation de conserver les mêmes excipients. Certains sont donc à l’identique mais d’autres non.

Inexact encore car, certes ils sont soumis aux contrôles de bioéquivalence (3), mais seul le principe actif est soumis à ces contrôles, pas les excipients.

Inexact, car par ailleurs cette notion même de bioéquivalence tolère une certaine différence ( !) entre les produits : pour être bioéquivalent, on doit retrouver dans l’organisme, avec le médicament générique, une quantité de principe actif similaire à celle retrouvée avec le médicament de marque, avec un intervalle d’acceptation de 80 à 125 % ! (4). Diable, on est loin ici d’atteindre « les mêmes normes de qualité » !

Inexact enfin car.. quid des excipients ? Ces « emballages » extrêmement variés modifient la biodisponibilité, la demie vie, confèrent à la drogue finale des qualités de stabilité, de forme (gélule, suppositoire, gel, gouttes, liquide, etc.,), des spécificités de dissolution, de ciblage, de goût, de couleur et d’esthétique ? Sans excipient, pas de médicament ! Et si vous pensiez par hasard que les excipients n’ont strictement aucune action vous vous trompez : parmi les plus utilisé (éthanol, fructose, aspartam, huile d’arachide par exemple), il en est une cinquantaine qui ont des « effets notoires » : ce sont les EEN (Excipients à Effet Notoires dont le J.O fait la liste (5). La présence des EEN peut donc nécessiter, du fait de leur dangerosité potentielle, des précautions d’utilisation.

Alors, les génériques tous identiques aux princeps ?

Mon œil ! Comme dirait l’autre !

L’information dispensée par l’Assurance Maladie pèche par manque de précision. Elle pourrait sans doute même, dans le cadre d’un procès, être présentée comme une information mensongère ayant causé un préjudice à un patient.

Alors, cessera-t-on bientôt de mystifier et les patientes et les médecins et les pharmaciens et leur dira- t-on un jour vraiment la vérité ?

Est-t-il réellement utopique de militer pour :

- Exiger des laboratoires génériqueurs qu’ils fabriquent exclusivement des produits réellement « à l’identique » du princeps ?

- De privilégier la substitution par des médicaments génériques de composition et de présentation identiques à celles du médicament princeps ?

- D’espérer des génériques dépourvus d’excipients à effet notoire ?

- D’interdire les génériques à « marges thérapeutiques étroites (trop peu dosés, ils n’ont pas d’effet, trop ils deviennent toxiques comme par exemple les génériques des antiépileptiques (7).

Quant à nous les médecins des femmes, intéressons-nous plus aux EEN. Et au fil des jours et des consultations, n’hésitons pas à informer nos patientes sur les ambiguïtés de la communication sur les génériques et à ajouter « NS » sur nos ordonnances si nous le jugeons utile.

Sources :

1."Bachelot soigne les pharmaciens", Le Canard Enchaîné n°4557, 27 février 2008

2. Ameli.fr pour les assurés, rubrique questions/réponses : www.ameli.fr/assures/conseils-sante/les-medicaments-generiques.php

3. Définition légale des génériques (Code de la Santé Publique-1996 ; article L.5121-1 CS) : « ...Spécialité qui a la même composition qualitative et quantitative en principes actifs, la même forme pharmaceutique, et dont la bioéquivalence avec la spécialité de référence a été démontrée par des études appropriées de biodisponibilité."

4. EMEA - CHMP : note for guidance on the investigation of biovailability and bioequivalence (26/07/2001 EUROPEAN COMMISSION, ENTERPRISE DIRECTORATE-GENERAL, Single market : management & legislation for consumer goods Pharmaceuticals : regulatory framework and market authorizations,Brussels,ENTR/F2/BL D(2003)

5.. http:/www.theriaque.org/journal/2ExcipNotoire.htm (JO du 10/03/2008)6. La substitution princeps/générique semble être un facteur associé à la survenue de recrudescence de crises pour certaines molécules. La Belgique et le Danemark ont décidé de réduire les bornes de l’intervalle de bioéquivalence, 6 pays ont interdit (Espagne, Finlande, Slovénie, Suède) ou encadré (Norvège, Slovaquie) la substitution de médicaments antiépileptiques par des génériques.

Posted via web from hypha's posterous

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