C'est un exemple spectaculaire de la nouvelle donne dans la pharmacie, des exigences toujours plus fortes des autorités sanitaires, et de la réduction du nombre de nouveaux produits qui en découle. Le médicament en cause : la cladribine, un comprimé contre la sclérose en plaques
Après des années de travail pour mettre au point un traitement oral contre cette maladie chronique, imprévisible et progressivement handicapante, le groupe allemand Merck pensait avoir touché au but en 2009, en proposant enfin une alternative aux lourdes injections actuelles. Il a donc déposé des dossiers pour commercialiser sa cladribine dans 40 pays, et obtenu les feux verts de la Russie et de l'Australie.
Des efforts trop coûteux
Hier, pourtant, marche arrière toute. Le laboratoire a annoncé qu'il allait retirer son médicament des marchés où il est déjà commercialisé, et qu'il abandonnait ses efforts pour l'enregistrer dans d'autres pays. Le groupe va passer par pertes et profits ce médicament, longtemps considéré comme un de ses plus prometteurs - les analystes évoquaient des ventes de 600 millions à 1 milliard d'euros par an. Il va passer dans ses comptes une charge de 20 millions d'euros, s'ajoutant à celle de 50 millions déjà prise fin 2010.
Il est exceptionnel qu'un laboratoire tue un produit à ce stade de développement, alors qu'il lui a déjà coûté des dizaines ou des centaines de millions d'euros. Mais prolonger les efforts aurait coûté très cher, sans garantie de succès.
Le projet a commencé à sortir des rails en septembre dernier. Les Etats-Unis autorisent alors le comprimé concurrent de Novartis, qui devient ainsi le premier traitement oral contre la sclérose. Au même moment, l'Europe refuse de donner son feu vert à la cladribine, estimant que les bénéfices ne sont pas supérieurs aux risques induits par le nouveau traitement. Un choc, qui provoque le départ du patron de Merck Serono, la filiale concernée. En mars, l'autorité américaine refuse à son tour la cladribine « dans son état actuel » , et demande des études supplémentaires. Là aussi, les inquiétudes portent sur les effets secondaires.
Lancer de nouvelles études ? Cela « prendrait des années » , estiment les dirigeants de Merck, qui ont préféré jeter l'éponge. Grâce aux traitements oraux, le marché de la sclérose en plaques pourrait passer de 10 à 14 milliards de dollars en quelques années, selon JP Morgan. Merck, lui, va tenter de défendre ses positions grâce au Rebif, son produit actuel en injection.
mercredi 22 juin 2011
Sclérose : Merck abandonne le produit qu'il vient de lancer
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